Histoire d'un lieu :
La ville de Jaffa est un paradoxe urbain, qui accueille à la fois les difficultés du dialogue israélo-palestinien et la richesse culturelle de la civilisation que ces deux peuples ont en partage. Cosmopolite, "la ville aux oranges" a servi de refuge aux prisonniers des camps de concentration, à partir de 1948 et de la création de l'Etat d'Israël. Aujourd'hui, la richesse de Jaffa réside dans son port et plus précisément dans cette ouverture maritime qui escamote discours politiques et dogmes religieux. Juifs, Arabes, Chrétiens, Orthodoxes ou Druzes, tous, foulent les pavés de cette ville. "En tournant à Jaffa, j'ai essayé de montrer que le conflit entre Israël et la Palestine ne peut pas être réglé en érigeant un mur", déclare la cinéaste Keren Yedaya.
Un projet politique mais esthétique :
C'est après avoir achevé le scénario de Mon trésor que Keren Yedaya a commencé à réfléchir au projet de Jaffa, qu'elle voulait politique et focalisé sur le conflit israélo-palestinien. Le désir premier de la cinéaste restait néanmoins de toucher un public plus large que les passionnés de politique eux-mêmes. Elle a ainsi trouvé son inspiration à la fois esthétique et politique dans le cinéma égyptien de son enfance: "Du point de vue du style, je voulais surtout faire un film séduisant et accessible : je souhaitais que Jaffa ressemble à un mélodrame populaire...une sorte de friandise pour le public, mais avec un goût étrange", confie-t-elle. Elle a ainsi renoncé à la grue ou à la dolly afin de s'écarter du modèle majeur occidental, au profit du zoom considéré comme mineur et populaire. Cherchant à élargir sa créativité, le metteur en scène a en outre voulu montrer qu'il était possible "d'apprécier la culture de l'autre (dans [s]on cas, la culture arabe), et pas uniquement la culture européenne qui reste le paradigme de ce qu'on considère comme "artistique"."
Echanges de points de vue :
A l'origine de deux courts-métrages en 2001 et de Mon trésor, son premier long-métrage en 2004, Keren Yedaya a depuis toujours travaillé en collaboration avec ses amies Sari Ezouz et Illa Ben Porat pour l'écriture de scénario.