Film en N & B.
Récompense :
Cannes 1961 : Palme d'or (Ex-aequo).
La censure :
Après avoir reçu un accord de tournage en Espagne, y est interdit. Le film obtient la Palme d'Or au Festival de Cannes mais les associations familiales et le Vatican déclenchent une violente opposition. La censure franquiste se rend compte de l'erreur qu'elle a commise en autorisant la présentation à Cannes. Elle interdit le film en Espagne et supprime tout visa du film à l'exportation, ce qui entrainera des difficultés de distribution.
Il était un rêve ....
C'est un télégramme de Gabriel Figueroa lui proposant de mettre en scène "je ne sais quelle histoire de jungle", qui fut à l'origine du projet Viridiana. Refusant l'idée originale, Luis Buñuel a obtenu du producteur Gustavo Alatriste une entière liberté d'écriture. Aidé de son ami Julio Alejandro, il a ainsi décidé de développer une ancienne rêverie érotique, dans laquelle il abusait de la reine d'Espagne grâce à un narcotique puis y a greffé une seconde histoire: celle d'une sainte italienne dont il avait lu la vie dans une revue chez les Jésuites. Ainsi est né le scénario provocant du film: "L'idée d'avoir à sa merci une femme endormie me semble très stimulante. Je peux la réaliser dans l'imaginaire, mais dans la pratique, cela me fait peur", confiait Buñuel.
Lieu de tournage controversé :
Lorsque le producteur Gustavo Alatriste a proposé à Luis Buñuel de tourner en Espagne, ce dernier n'a accepté qu'à la condition de travailler avec la société de production du cinéaste Juan Antonio Bardem, connue pour son esprit d'opposition au régime franquiste de l'époque. Malgré les vives protestations au Mexique des émigrés républicains, le film fut tourné durant huit semaines, en studio à Madrid, puis dans une propriété hors de la ville. Le cinéaste a été qualifié de "traitre" par les opposants à la dictature espagnole, jusqu'à la projection officielle du film qui leur a fait changer d'avis.
Souvenirs d'une existence madrilène :
Présente sur le tournage de Viridiana, la soeur de Buñuel raconte les conditions d'existence de son frère, qui dormait fenêtres ouvertes, à même le sol, malgré les quatre lits de l'appartement de la Torre de Madrid. Quittant sa table de travail pour admirer le paysage près de la Casa Compo et du Palais Royal, le cinéaste aimait regarder le soleil se lever sur la ville. D'une patience d'ange, Luis Buñuel avait l'habitude de changer les données de son scénario pendant le tournage et a choisi de tourner avec les authentiques "costumes" désinfectés mais non lavés des vagabonds de la ville, qui ont reçu en échange des vêtements neufs. A la mort de leur frère Alfonso, la soeur du metteur en scène a dû quitter le tournage du film et l'existence qu'elle y menait en famille.
Acteurs fétiches :
Si après Belle de Jour et Nazarin, Luis Buñuel a retrouvé Francisco Rabal sur Viridiana, c'est en revanche sa première collaboration avec Silvia Pinal et Fernando Rey. Le cinéaste retrouvera par la suite la première dans L'Ange exterminateur et Simon du désert et dirigera le second dans Tristana et Cet obscur objet du désir. Dans ses souvenirs de tournage, Buñuel évoque avec plaisir les acteurs amateurs de son film et plus précisément celui qui jouait le rôle du lépreux: "Il échappait à toute direction d'acteur et pourtant je le trouve merveilleux dans le film", confie t-il, évoquant son naturel et ses fréquents moments d'égarement. Scandalisé en apprenant que ce dernier était moins payé que les autres acteurs, le metteur en scène a exigé un juste retour des choses auprès des producteurs. Un jour, reconnu par deux touristes français dans la ville de Burgos, le singulier personnage aurait rassemblé ses affaires et jeté son baluchon sur son épaule en déclarant: "Je vais à Paris! Je suis connu là-bas!." Il mourut en route, raconte Buñuel.